Thứ Năm, 11 tháng 5, 2017

Journal d' un sous-lieutenant par Thái Lãng / traduit par R.P. Nguyễn ngọc Lan (Le Crépuscule de la Violence /Ed. Trình Bầy. Saigon )

journal d' un sous-lieutenant par thái lãng
éd. trình bầy, saigon



                                            le crépuscule de la violence
                                                               (poèmes, nouvelles, témoignages d' une guerre)
                                                                             ÉDITIONS TRÌNH BẦY, SAIGON 1960.


                                                                  linh mục-văn sĩ nguyễn ngọc lan [1930- 2007 saigon]
                                                                                   (ảnh trong vòng tròn bên phải)
                                                            trên bìa bút ký '5000 km xuyên việt/ thế phong' (saigon 2007)



                               journal d'un sous-lieutenant
                                                    thái lãng

                                                                               TRADUIT PAR R.P. NGUYỄN NGỌC LAN


 Le...

À titre provisoire, on vient de m'affecter comme interprète au bureau des conseillers américains du secteur.  Cette nouvelle charge m' inquiète plus au moins.  Jusqu' ici le monde des Américains demeure pour moi étranger.  Ils sont là, dans ce pays, depuis dejà des années, et pourtant je me sens si loin d' eux, et comme un peu plus loin chaque jour.  Ils travaillent, s' amusent, mangent, se reposent dans quelque immeuble à part, souvent entouré de barbelés, toujours 'bien'.  À l' époque où j' habitais encore Saigon, je levais souvent mes yeux vers ces buildings imposants, propres, ne manquent pas de lumière, pour regarder des Américains, plus exactement, les G.I., torse nu et en train de s' exposer au soleil à peu près comme les soldats francais de naguère.  Les rues les plus jolies, les plus animés sont maintenant envahies par des bras égayés par des filles viêtnamiennes.
Seuls les Américains sont là-dedans, les Viêtnamiens n' y entrent pas.  Pourquoi?  Je l' ignore . Quand je fréquentais un cours d' anglais de la V.A.A. (*), j' avais quelques contacts avec eux sans pouvoir me trouver plus proche d' eux.  Je me rappelle seulement que notre professeur américain nous parlait souvent de ce qu' il gagnait par mois, des chiffres énormes qui faisaient murmurer ou rêver mes charmantes condisciples.  Mais à partir d' aujourd'hui je travaille pour de bon à  leur côté.
---
(*) Viêtnamese -Americain Association .

Lorsque je suis allé out à l' heure me présenter au Commandant Conseiller en Chef du secteur, je ne l'ai pas trouvé à son bureau mais au mess, écoutant la radio avec d'autres officiers americains (ils travaillent ici dans leur quartier résidentiel même, et en cas de besoin se communiquent par téléphone avec les services du secteur).  Le Conseiller m' apparut gros, grand, un peu lourd. Après m' avoir écouté, il se' est levé pour me taper légèrement sur les épaules:

--Good, good boy!

Cette facon de  m'appeler 'boy' m'a vraiment étonné.  Le Conseiller m'a donné ensuite des préci-
sions sur mon travail quotidien et sur l'horaire . (ils continuenr à suivre ici l'horaire de chez eux).

 Je l'ai écouté à peine, observant autour de moi, et me sentant égaré, étranger par rapport à tout. Ce premier contact m'a pluto^t décu.


Le ...


J' ai accompagné un capitaine americaine dans sa visite de K.M.  L'officier chef du district, le 'quận trưởng', est allé jusqu'au terrain d'attérrissage de l'hélicoptère pour nous accueillir. L'entrevue a été pluto^t amicale st bien su^r, je leur ai servi d' interprète.  Le Capitaine Conseiller a voulu faire l'inspection des postes de miliciens.  Le chef du district, 'trop pris par ses occupations', a désigné un autre officier pour nous y guider.

Les postes sont d'une construction sommaire et abritent aussi bien els miliciens que leurs femmes et enfants.  Désordre, saleté, obscurité.  Plus d'une fois, le capitaine américain fait remarquer le manque de sécurité de l' emplacement et le mauvais nettoyage des fusils.  À chaque coup, notre guide tâche de chercher des excuses à la situation en cause et se tourne ensuite du côté des miliciens pour le faire un sermon ou fusent injures et obscénités.  Le Conseiller ne comprend guère ce genre de discours, mais à voir la manière convaincue de l'officier, il se montre plutôt satisfait et me glisse dans les oreilles que le 'bot' fait bien de son boulot.

De retour au Centre, nous allons voir le 'quận trưởng' à son bureau même. 

 Le milicien de garde s' empresse de nous y introduire sans avertir au préalable son chef qui est en train de lire. En nous apercevant, il referme d'un geste à la fois discret et rapide son livre.  Sur le dos épais de celui-ci, je suis quand-même lire en toutes lettres le titre d'un roman d'aventures. Le chef du district ne cache pas sa fatigue. Une main posée dur un tas de dossiers, li nous interroger sur la rapide tournée d'inspection que nous venons d'achever. Le Conseiller sort de sa poche son calepin pour lire ce qu'il y a noté.  L'un et l'autre semblent en parfaite entente et se promettre de 'faire chacun tout son possible pour faiciliter la tâche de l'autre dans les limites de sa propre compétence'.  Le Chef du district remercie en plus l'Américain pour les conseils inestimables que celui-ci a bien voulu lui prodiguer.  En se quittant, ils se serrent longuement la main.

Dans l'hélicoptère, le Conseiller me demande si le bouquin que lit avec tant d'attention le Chef du district est bien un important traité de stratégie. Je ne dis rien.  Il continue d'une voix émue:

- Je pense que c'est un 'boy' vraiment bien.  Malgré ses multiples occupations, il se donne encore la peine d' étudier la stratégie.  À ma derrière visite, je l'ai déja vu en train de se plonger dans la lecture ses bouquins ausi épais et un interprète m'a dit que ce sont des traités de stratégie.  Good, very good, il tuera certainement beaucoup de Việt-Cộng.


Le...


Nous visitons aujourdh'ui B.T. juste au moment où le Chef de ce district append pqr son officier de renseignement que de nombreux 'Việt-Cộng' se trouvent quelque par aux alentours.  Il parait inquiet et donne l'ordre d'appeler par ondes cortes le secteur pour demander un vol de reconnaissance.  Dans le cas où l'ont rouve vraiment des Việt Cộng, il faut les bombarder immédiatement.  Quelques instant apres, un L. 19 survole le district.  Tous, nous nous retrouvons dans la salle radio pour communiquer avec le L.19 qui transporte deux observateurs dont un Américain et un Viêtnamien.  L'officier charge de renseignements du district leur fournit des indications sur la zône probablement infestée.  Un moment après, j'entends une voix viêt-
namienne sortir des ondes:

- D'après ce que je puis voir, ce ne sont pas des Việt-Cộng, mais seulement des paysans en train de moissonner. Ils portent vêtements noirs, chapeau de paille et leurs activites ne montrent rien de suspect.

-Avez vous bien observé? réplique notre officier charge de renseignements.  Vous devez vous approcher davantage du sol. 'Il's se déguisent tres souvent.  Descendez.  Refardez comme il faut buissons et fouillis.

- Mais le salaud ne veut pas voler plus bas. D'ailleurs on ne voit pas beaucoup d' arbres par-ici.

-Y-a-t-il des embarcations?

-Oui, celles destinées au transport du riz et qui se rangent le long du canal.

Je traduis tout pour le Capitaine Conseiller.  Il veut ensuite se mettre lui-même en communication avec l'observateur américain de l'avion. L'entretien se poursuit entre eux:

- Hello, ne voyez-vous rien de suspect?

-Mais si, mais si.  Many, many a lot of Victor Charlie. [V.C.]!  Ils sont en train de se rassembler en vue d'un mouvement de troupe.  Ils sont vêtus de noir.

- Comment sont-ils équipés?

- Je ne vois pas très nettement. Il me semble qu'ils portent en main des armes légères.  Quant 
aux armes lourdes,  ils devraient les transporter dans ses embarcations, bien cachés sous de paille.

-Dites-moi ce que vous en pensez?

- Mais demandez vite un bombardement.  Sinon, ces troupes pourront attaquer le district dès cette nuit.

- Laissez-mois demander l'avis du Chef de District ... Il n'est pas su^r que soient des V.C. Probablement des paysans, selon lui.  Il a fait apporter tous les rapports des chefs de hameuax pour vérifier l'état des moisssons de ce côté-là.  Aucun rapport ne permet de croire que l'on a fini de moissonner.

Puis se retournant vers le Chef du district, il lui dit:

- Vous avez sans doute le droit de penser que ce ne sont pas des V.C., mais, à mon avis, le capitaine américain qui pilote le L.19 et qui observe ne peut pas se tromper, puisqu'il se trouve juste au-dessus de ces gens et voit mieux que nous ici.  À ne pas appeler un bombardemnet immédiat, je crains que ce ne soit trop tard cette nuit lorsqu'il attaqueront.

Le Chef du district demeure perplexe quand l'officier de renseignement ajoute:

- Capitaine (tous les chefs de district sont pris parmi les officiers), demandez tout de suite un bombardement.  Profitez de la présence du Conseiller américain, il l'obtiendra plus vite:

-Quand-même, répondit le Ched du district ordonne une nouvelle observation.

La voix sort de nouveau de la radio.  L'observateur viêtnamien se met à jurer comme un charretier et se plaint de ce qu'il ne peut rien affirmer, le pilote américain refusant d'aller voir de plus près. En même temps ce dernier continue à décider que beaucoup de Việt-Cộng doivent se trouver dessous et qu'il faut les bombarder immédiatement.  Je suis obligé de tout traduire.  À la fin, le Chef du district s'adresser à l'officier de renseignements:

- Ca va, demandez le bombardement.

Le radio répond d'une voix sourde:

- Many V.C.... O.K., O.K. ...

Quelques instants apres les O.K., une escadrille arrive.  La fumée s'élève, noircit toute une partie de l'horizon.  Je pense à ceux qui sont morts, à tous ces Viêtnamniens qui tombent sous le feu américain de cet après-midi: sont-ils du 'Việt-Cộng' ou du 'Viêtnam', personne le saura.  Très problablemnt, le pilote-amériacin-qui-ne-peut-pas-se-tromper, s'est trompé pour de bon, parce ce qu'il ne searit là au Viêtnam que depuis une semaine et dans cette province que depuis avant-hier.


Le ...


J'ai été avec le sergent infirmier américain pour faire la distribution des médicaments aux gens de différents district. Il m'a confié que cette fois sa pharmacie est loin d'être suffisamment variée, mais que l'on a du^ faire quand-même la tourné pour suivre le programme fixé.

Une table est installé devant la mairie.  Les hauts parleurs carchent à la longueur de la journée d'interminables invitations aux villageois; le soldat de la guerre psychologique ajoute encore de son propre cru un slogan tragi-comique: "Occasion rarissime, une fois tous les mille ans, ne le manquez pas! ...

" Deux infirmières, l'air maussade, assistent le sergent américain qui ne se montre pas plus accommodant.  Des veillards squelettiques, des femmes avec leurs enfants pâles et maigres, présentent toutes sortes de maladies, irritations cutanes, otites, trachomes, etc ... Tous sont d'une misère inimaginables.  Le bienfaiteur U.S.A. ordonne incessamment aux miliciens en service d'obliger les gens à faire la queue.  Les deux infirmières ne sont pas très habiles, s'agitent, font des manières.

Une pauvre veille s' amène, appuyée sur une canne, et demande quelque chose contre sa toux. L'une des deux infirmières lui répond sèchement que l'on n'en a pas.  Le sergent américain veut savoir de quoi il s'agit. Je lui répète en anglias et la requête et le refus. Après un petit instant de réflexion, il prend en toute sérénité un flacon de multivitamines, en titre quelques comprimés et les donne à la veille femme.  Il me dit d'expliquer à celle-ci le mode d'emploi, et d'ajouter que c'est un bon médicament qui devra calmer sa toux dès demain.

Étonne, je proteste:

- Mais ce n;est pas quelque chose contre la toux.

-Les vitamines sont inoffensives, et peuvent toujours rendre service.

-C'est du bluff.

- Du bluff! Du bluff! Qu'est-ce que ca signifie? La vieille ignore tout, les vitamines ne tuent pas, et moi, je ne veux pas qu'elle rentre les mains vides.  Les sacrés V.C. pourraient dire en propagande que le conseiller américain manque de médicaments ou qu'il n'est pas très généreux à l'égard du peuple ...

-O.K., j'ai compris ! ...

Je ne lui précise pas ce que j'ai compris: il ne s'agit même pas de médecine psycho-somatique, mais simplement de guerre psychologique.

Depuis ce moment, chacun obtient le remède qu'il sollicite pour son mal et tous sont contents. Mais de retour chez eux, si par hasard ils se permettaient montrer les uns aux autres les médicaments recus, ils pourraient s' émerveiller du fait que les savants américains ont trouvé la formule universelle pour guérir presque toutes les maladies connues dans le village: la toux,
 l' asthme, le rhumatisme, les bronchites, les maux d'estomac, du foie, la fatigue,générale, etc ...

J'en ai été écoeuré. J'ai senti toute la compassion et la honte pour mon peuple .


Le ...


Je pourrais rester plus longtemps à côté de mes conseillers américains, s'ils ne s'obstinaient à médire sur les officiers viêtnamiennes, à leur reprocher durement d'être ignorants, paresseux, 'de dormir le jour et faire des gosses de la nuit', à proférer jurons et obscénites devant mes propres chefs, etc... etc... Le Conseiller en chef, gros, grand et un peu lourd, m'a toujours appelé 'boy' et m'a récemment pose cette question:

_ Es-tu satisfait quand nous bombardons le Nord-Viêtnam?

- Je ne sais pas trop.

- Pourquoi?

- Ces régions, ces rizières, cette population ont déjà bombardées trop souvent par les francais
 d' hier. 

- Mais aujourd'hui ce n'est pas la même chose avec les Américains.  Nous n'envahissons pas votre sol, nous ne nous emparons pas de votre riz, nous ne sommes pas chefs dans vos bureaux, nous ne commandons pas dans votre armée. Votre pays est pauvre, nous l'aidons, c'est tout!

Je n'ai rien ajouté ả ce discours: Conseiller en chef, il pourra à tout moment me recommander au Service de la Sécurite Militaire si je ne suis pas d'accord.  J'ai manqué de courage.

Pourtant je n'ai pas cessé de penser au bombardemnet du district de B.T. de l'autre jour, aux comprimés anti-toux, aux initiales qui viennent de changer sur l'insigne que porte le Conseiller en
chef au bras; M.A.A.G. (*) ont été remplacées  par M.A.C.V. (**).
---
(*)    M.A.A.G. : Miltary American Advisor Group.
(**) M.A.C.V. : Military American Command Vietnam.

Le dégou^t et la honte m'ont pris à la gorge. Parce ce que je ne suis pas très courageux, je ne peux montrer mon amour pour mon pays que de la facon dont s'accommode mon manque de courage: Je viens de demander ma réintégration dans mon ancienne unité, pour y être viêtnamien avec les Viêtnamiens. []

thái lãng
TRADUIT PAR NGUYỄN NGỌC LAN

(p. 40-51 LE CRÉPUSCULE DE LA VIOLENCE/ Éd. Trình Bầy , Saigon Xe.)

                                                                       



                                                              trái qua: RP Nguyễn ngọc Lan [1930- 2007 saigon]
                                                                                   (hàng thứ 1 , ngoài cùng)
                                                       đi đưa đám tang văn sĩ-chủ báo Trình Bầy Thế Nguyên- Trần gia Thoại 
                                                      [1942- 1989 saigon] tới nơi an nghỉ cuối cùng ở  Nghĩa trang Bình Hưng Hòa.
                                                                                   (quận Tân Bình/ tp. HCM).

                                                                (Nguyễn quốc Thái cung cấp ảnh-/người đeo kính cận (giữa)
                                                                          đứng cạnh con trai Thế Nguyên, cẩm di ảnh bố). 

0 Nhận xét:

Đăng nhận xét

Đăng ký Đăng Nhận xét [Atom]

<< Trang chủ